Harry m'avait fait venir cet après-midi pour m'annoncer qu'il avait besoin de moi pour une mission. Un cambriolage avait-il précisé. Je m'étais empressé de faire celui qui était fou de joie. D'une certaine manière je l'étais. Sauf que je n'avais plus envie de jouer les malfrats. Mais bon, pour le moment, je n'avais pas vraiment d'autre choix. J'avais donc remercié Harry et avait noté comme il se devait les explications qu'il m'avait donné dans un petit recoin de ma tête.

Le soir venu, nous étions lui et moi ainsi que Natasha à bord de la voiture. Nous observions une maison. Je n'aimais pas les cambriolages. Non pas que m'introduire dans une maison dans demander la permission me posait problème. Mais dérober des choses qui pouvaient avoir une valeur sentimentale me faisait mal au ventre. Je n'aurais pas aimé qu'on vole la chaîne en or que je porte autour du cou et que j'enlève à chaque fois que je prends la douche. Elle n'est pas très chère mais elle a beaucoup de valeur pour moi... Mais ça, personne ne le sait, pas même Harry. Enfin, vous voyez! Quoi qu'il en soit, je ne dis rien de tout ça. Je reste silencieux, c'est ce que j'ai de mieux à faire. D'autant que je sens, que premièrement, Natasha n'est pas particulièrement emballée de le savoir là. Sauf qu'elle n'a pas son mot à dire, le boss m'a demandé de venir, point! Mais ce n'est pas ça qui me pose le plus problème, c'est plutôt le deuxièmement qui m'angoisse. Moriarty est au courant et veut la même chose que nous...

D'accord, on va faire avec n'est-ce pas? Il va bien falloir de toute manière. Harry m'a fait confiance et pour conserver cette confiance, au moins pour le moment, je vais faire absolument tout ce qu'il me demande. Pas de gaffe, pas de geste trop empressé, pas de cris si l'alarme s’enclenche! On garde constance et on fait bonne figure. Mais si un bijou de famille me semble trop précieux émotionnellement, qu'il ne compte pas sur moi pour le piquer... A moins que je n'aille chercher dans les placard et au passage, emporter un paquet de gâteaux salés, c'est une idée et ça ne blesse pas les gens, des biscuits en moins. Après tout, à deux, ils peuvent bien prendre les papiers et leur vase si précieux non? Je suis presque certain, tout à coup, que je ne suis là que pour faire figuration ou alors, diversion au cas où? Je me fais des idées? Ce ne serait pas la première fois!

"Près!" Dis-je dans un murmure. Pas nécessaire d'en dire plus n'est-ce pas?

Sortir de la voiture, rejoindre le perron de la porte en silence, s'arrêter pendant que Harry crochète la serrure. Rien de bien extravagant, rien de bien compliqué... Rien de bien passionnant en un mot. Pourtant, l'excitation de Natasha est affreusement palpable. Une vraie puce qui a bien du mal à se tenir tant les choses me semblent vides de sens depuis quelques temps. Mais je laisse courir et suis mon bonhomme de chemin dans cette affaire. Je n'oublie pas que c'est Harry qui m'a demandé de venir, autant faire bonne impression. Mais sourire, il ne faut pas non plus en demander trop! Je suis juste là pour faire mon job, même si il ne me plait plus. Beaucoup le fond sur Terre non?

Enfin, jusqu'à ce qu'un gros matou fasse sursauter mon patron. Ce n'est pas sourire qui je fais, c'est pratiquement exploser de rire. Mais aucun son ne sort de ma bouche, cependant. Je regarde Harry repousser le chat... Je n'aime pas ce geste qu'il a mais alors pas du tout. Celui de Natasha m'étonne plus, elle caresse la boule de poil... Ce que je m'empresse de faire derrière elle, me retenant pour ne pas faire un gros câlin à minet. Mais je ne suis pas là pour ça, n'est-ce pas? Je dois impressionner Harry ce soir, c'est mon but, bien qu'il n'en sache rien. L'impressionner et rester sans émotions pourtant parce que rien de tout ça ne m'emballe pour le moins du monde. Comme je l'ai dit, je n'aime pas cambrioler, c'est violer l'intimité, cela me rebute.

La voix de Harry s'adresse à moi et je me retiens de grimacer devant lui. Mais pour qui me prend-t-il, un gamin? Je le laisse parler sans réagir, sans même hocher la tête. Oui, oui, j'ai bien comprit! Aussi silencieux qu'un chat... Plus que toi, en tout cas!

Quant il se met à me parler des gâteaux, là, je ne peux m'empêcher de grimacer. Pour la simple et bonne raison que ses deux kilos en plus... Il doit bien avoir une poutre dans l’œil pour le croire. Ce serait plutôt l'inverse. Depuis la mort de Toffee, j'en ai perdu 5... Mais passons... Je ferrai ce qu'il faudra faire ce soir, un point c'est tout! Même si l'envie est dure de résister à piquer un paquet dans la cuisine... Mais pas tant que celle d'aller revoir le chat. J'ai besoin de son contact pour me sentir bien, là, tout de suite! Mais je n'en ferai rien non plus!

Ce soir, je volerai un vase, peut-être un ordinateur pour les données qu'il contient (et que je pourrais peut-être partager avec... Non, chuuut...)... En tout cas, rien de plus. Je ne piquerai pas l'argent des portes-feuilles ni les bijoux de famille! Parce que je n'en ai pas envie! Parce que rien ne m'y oblige! Lorsque la voix de Natasha se fait entendre, je n'attends pas plus longtemps. Mes yeux se sont habitués à l'obscurité et je file dans le salon. Surement l'endroit où se trouve le vase non? Peut-être même l'ordi, à moins que ce ne soit dans le bureau, qui doit se trouver au premier... Mais bon, je garde le rez-de-chaussé pour le moment...

Quelques instants à peine après être entré dans le salon, une boule de poil vient se frotter contre ma jambe:

"Eh, salut toi!" Dis-je dans un murmure. Il ronronne et je ne peux m'empêcher de le prendre dans mes bras. Ce n'est pas le même chat que tout à l'heure. Deux chats dans cette maison? Et si j'en prenais un, ils ne le verraient même pas, ça se trouve? Nooon Aaron, on se concentre!

"Tu ne saurais pas où se trouve un vase par hasard, pas très grand tu vois, cette taille à peu près... Il est superbe parait-il... Même si je n'y connais rien en vase, c'est vrai..."

Le chat ronronne de plus belle, sans autre message... Forcément. Je le repose et inspecte la pièce avec la torche dosée au minimum de luminosité. Une télévision du moyen-âge, franchement, dans une maison pareille, c'est une honte. Un canapé centenaire en cuir, confortable? Pas sur... Un cendrier, beurk... Un vase? Un Vase dans le coin? J'en vois pas. Surement pas celui avec les roses sur la table dans le coin, pas assez "superbe"... Pas comme celui de la photo de Harry...

Après inspection, pas de vase dans le salon, zut... Je ne sais pas où sont partis les deux autres, j'aurais peut-être du m'y intéresser mais... Bof...

Je décide de monter à l'étage, bureau, salle de bain, chambre d'ami... Quand un bruit provenant du salon, un grand bruit de verre brisé se répand dans la maison... Ça y est, c'est bon, ça va encore être ma fête, je le sens... Je me glisse dans la salle de bain, le coeur battant, attendant le début des hostilités.